Nous allons, dans cet article (partie 1) revenir sur l'analyse complète d'une séance d'entrainement course à pied (dans la partie 2 , nous aborderons l'aspect biomécanique)
Le monitoring portait à la fois, sur :
Les systèmes, ventilatoires, cardiovasculaires et musculaires
Les aspects biomécanqiues du mouvement avec l,'intégralité des datas inhérentes (Partie 2)
Le matériel utilisé et les valeurs enregistrées :
Système de mesure d'échange gazeux (Vo2 master)
Volume d'oxygène, Vo2 (ml/min/kg) et (ml/min)
Volume courant, Tv (L)
Volume total, Ve (L/min)
Fréquence respiratoire, Rf (Bpm)
Fraction d'extraction d'oxygène, FeO2 (%)
Equivalent ventialoire en Oxygène, EqO2 (L)
Fréquence cardiaque, HR min, moyenne, max (Bpm)
Intervalle R-R (ms)
Variabilité de la fréquence cardiaque
Pression atmosphérique (mmHg)
Humidité dans l'air (%)
Mesure d'oxymétrie musculaire (Moxy)
Oxymétrie musculaire, SmO2 (%)
Taux hémoglobine, ThB
Mesure de température (Core)
Température centrale (°celsius)
Température cutanée (°celsius)
Mesures métriques de puissance et dynamique de foulées (Stryd Duo path) analyse Partie 2 de l'article
Puissance moyenne, max (w)
Vitesse (min/km)
Distance (Km)
Cadence (ppm)
Longueur de foulée, Stride L (m)
Temps de contact sol, GCT (ms)
Oscillation verticale, Vo (cm)
Ratio vertical, Vertical R (%)
Elasticité poussée, LSS (K N/m)
Puissance verticale, Form Power (W)
Taux charge impact au sol, Impact Loading Rate (bw/sec)
Résistance au vent, Air power (%)
Equilibre temps contact au sol, Balance GCT (%)
La séance réalisée
L'athlète mesure 187cm pour 72 kg, il a une puissance critique (Crit P) Run Outdoor de 322 w, ce qui génère les zones suivantes :
Les données de charges externes principales
Dans cet article on va concentrer l'analyse plutôt sur les séries de :
2 min
3 min
4 min
5 min
Nous verrons dans la partie 2 de l'article (analyse bio-mécanique) que certaines séries sont faites en montées (entre 2 et 4%) et d'autres avec l'influence du vent.
Aussi, la puissance reste le meilleur indicateur
La Charge Interne
Commençons par la consommation d'oxygène (Vo2) sur l'ensemble de la séance, avec le volume courant (Tv), et la fréquence ventilatoire (Rf)
Consommation d'oxygène (Vo2)
La temps passé par tranche de Vo2 pour cet athlète dont la Vo2 max a été mesurée récemment à 64,5 ml/min/kg
La Vo2 par tranche de cette séance nous donne
55% entre 50 et 60ml/min/kg
11% entre 61 et 66ml/min/kg
4% entre 67 et 75ml/min/kg
Le temps théorique passé à VO2 programmé par la séance était de 20', cela correspond au 20' de la Zone Z5.
Cependant, avec la cinétique de vo2 et le nombre de répétitions, on sait, de facto, que ce temps de 20' est très théorique, et que la cible, au vu des répétitions plutôt courtes (cinétique de Vo2) du début d'exercice, va grandement faire baisser ce pourcentage.
Cette analyse permet justement de mesurer la durée réelle de la sollicitation à Vo2 max.
On considère, dans ce genre d'exercice, que la cible (entre 6% et 10% sous Vo2) se trouve concernée pour la sollicitation désirée.
Dans le cas de cet athlète, la cible est donc, 64,5 x 8% = 59,34 ml/min/kg
Avec 9'43 au dessus de cette valeur de 59 ml/min/kg, la totalité du temps accumulé est bien inférieur au 20' théoriques programmées
Nous aborderons dans la conclusion de la partie traitant la sollicitation physiologique afférente à la charge interne :
Quelles sont les pistes et enseignements à tirer pour cet athlète
Comment calibrer les séances de façons plus individuelles si on souhaite un travail suffisant pour developper des adaptations à Vo2 max
Les données ventilatoires
Le volume ventilatoire de cette séance est évidement à corréler au volume ventilatoire idéal (Lire article traitant du sujet)
Avant ce test, une spirométrie a été effectuée, nous donnant un FeV1 de 5,25L..
TV Idéal 75 : 3,93 L
TV Idéal 80 : 4,20 L (pas réellement adapté à la course à pied à cause du rôle du diaphragme comme stabilisateur du tronc, lire ici )
58% seulement du volume courant Tv est supérieur à 3 L réparti comme suit:
35% entre 3 et 3,5 L
18% entre 3,6 et 3,9 L
6% entre 4 et 4,4 L
Nous nous devons, dans une approche d'optimisation de la performance, de définir des critères plus précis, et évoluants de la même façon que le changement d'état métabolique qui s'opère dans ce type d'effort.
En effet, ce Tv "idéal" demeure plutôt proche de la réalité jusqu'à l'approche du Seuil ventilatoire 2.
Néanmoins, au-dessus de ce dernier (comme dans cette séance aux environs de Vo2 max) comme son nom le laisse à supposer, le seuil ventilatoire 2 ou le seuil d'inadaptation ventilatoire (Sv2) qui décrit le changement de l'état stable métabolique vers une zone de dérive des systèmes d'instabilité métabolique, nécessite d'opter pour un ajustement de ce Tv Idéal au dessus du SV2.
L' accumulation de Co2 (métabolique et non métabolique) devant être impérativement contenue pour garder une pression partielle tendant vers l'équilibre homéostatique, la hausse mécanique de la fréquence ventilatoire (Rf) nous oblige à changer notre approche pour déterminer le volume courant idéal (Tv idéal).
Avec des Rf dérivant, parties de 10ppm/min au repos jusqu'à plus de 70ppm/min pour certains, il est facile d'appréhender la difficulté d'exercer des cycles ventilatoires avec un volume basé sur le FeV1 (voir article) alors qu'on dispose de moins de 1 seconde pour effectuer l'inspiration et l'expiration
Dans ce cas la, il parait arbitrairement opportun de faire appel au test de débit inspratoire (en L/s).
Il fait également sens de ne prendre que 65% de ce volume pour le revendiquer en volume courant "idéal" (Tv idéal Sv2) au dessus du Sv2.
Ce test a été réalisé par l'athlète avec le résultat suivant, 5,65 L, soit 3,67 L pour ce nouveau Tv idéal Sv2
Nous utiliserons ce Tv Idéal SV2 pour évaluer la fonction ventilatoire dans les séries de 2-3 et 4'
La fréquence respiratoire enregistrée lors de cette séance est contenue avec:
75% entre 33 et 45 bpm.
4% seulement entre 46 et 52 bpm
Il est important de corréler cela à un Hr max de 181, ceci dénotant, malgré un TV pouvant etre bien améliorer, une relative maitrise de la Rf
La fraction d'oxygène extraite de l'air expiré (FeO2) est la résultante, entre autre, de la Rf contenue et du TV (certes bien améliorable), à savoir, très correcte pour ce type d'effort.
La quasi-totalité de la séance est comprise entre 16 et 17%.
En dessous de 16%, on améliorerait le coût énergétique et l'axe d'upgradation du Tv, plus proche du Tv "idéal", ce qui tendrait certainement à faire passer le FeO2 bien en dessous des 16%.
Nous testerons cela sur une séance identique d'ici quelques semaines après un travail spécifique sur la stratégie ventilatoire à l'effort.
L'évolution de la temperature centrale vs Cutanée
L'analyse spécifiques des séries
2, 3, 4 et 5' (Z4)
Consommation d'oxygène par série et rendement énergétique
On aurait parfois tendance à l'oublier dans les analyses physiologiques, mais le but ultime est toujours le rendement (la vitesse d'avancement).
Intéressons nous d'abord au volume d'air total rapporté à la puissance moyenne développée :
Avec respectivement 1 ml/min/kg d'oxygène et un 1 L d'air inspiré, combien de Watts produit-on?
A savoir que l'analyse des intervalles <3' ne sont que guère intéressants sur le sujet car les voies métaboliques de production énergétiques permettent cette latence (consommation d'oxygène) qui est modélisée à travers la cinétique de Vo2.
Pour les intervalles courts, nous observerons dans la partie analyse biomécanique le rapport Power/Speed
Stratégie Ventilatoire par séries
Sur la base du Tv idéal Sv2 de 3,67 L (défini en début d'article), bien que nous ayons encore une marge de progression dans ce domaine, l'athlète utilise ce dernier de façon plutôt efficace, en limitant notamment la fréquence respiratoire (Rf) et sa dérive en la contenant à :
41 ppm sur la série de 4' en Z5
38,5ppm en pour la série 3' Z5 et la 3ème série 2' Z5
Il n'y a pas d'effondrement du Tv au profil d'une forte hausse de la Rf
Le tableau ci-dessous résume assez bien le fonctionnement et rendement physiologique.
La série de 5' (effort inférieur et théoriquement sous Sv2) est la plus économique avec 22,26L d'air pour extraire 1 L d'oxygène, ce qui nous donne un FeO2 à 16,44%
Si on compare la Série 4' Z5 vs série 3' Z5, on note l'avantage à cette dernière notamment grâce à un Tv supérieur (+0,02 L) et une Rf inférieure (-3,62) qui lui octroye un meilleur FeO2 (-0,14%)
Mais qu'en aurait-il été si la série de 4' n'avait durée que 3' ?
Intéressons nous alors à ce qu'il se passe de la 3ème à la 4ème minute.
La réponse ci dessous :
Sur les 3 minutes de chaque série, les valeurs ventilatoires de volume courant (Tv) sont identiques, la fréquence ventilatoire est légerement supérieure sur le début de la série 4', avec de concert un moins bon efficient FeO2 (+0,09%)
A l'hypothèse que nous avions évoquée, à savoir que les observations des données physiologiques étaient peut être identiques et que la différence finale venait de ce qu'il se passait dans la 4ème minute.
A la lumière de la découpe ainsi faite, la réponse est oui, à savoir que la sollicitation physiologique est très sensiblement équivalente.
Et, ce n'est pas si inattendu car, cela nous traduit en fait parfaitement la dérive des systèmes avec une sollicitation supérieure à 110% de la Puissance critique (Crit P).
Vous trouverez ici la définition de cette dernière (lire ici).
On note cela de façon encore plus nette sur la découpe "Série 4' last 30" (en vert), il s'agit des 30 dernières secondes de la série 4' Z5.
Outre le fait de confirmer que les systèmes dérives de façon croissante, on note que nous sommes encore dans une forme d'un certains "controle de cette dérive"
Vo2 augmente toujours
Le volume courant est quasiment identique
Rf augmente progressivement comme le Volume total (Ve)
Fe02 perd également
Réponse cardiaque à l'exercice
L'étude de la cinétique de la fréquence cardiaque lors d'une séance d'intensité comme celle ci nous donne de précieux indicateurs sur la sollicitation et l'état adaptatif (en comparant des séances avec sollicitations similaires)
On note ici la dérive de la Fréquence cardiaque (Rf) sur l'ensemble des séries oû nous prendrons comme repère la fin de chacune d'entre elles en y associant la Rf
Série 1 60": 157 bpm
Série 2 60": 162 bpm
Série 3 60": 163 bpm
Série 4 60": 169 bpm
Série 1 120": 168bpm
Série 2 120": 170 bpm
Série 3 120": 172 bpm
Série 180": 169 bpm
Série 240": 181 bpm
Les contres-exercices voient également la fréquence cardiaque s'abaisser mais les pics bas de cette dernière sur les séries observent la meme dérive croissante allant de 132 bpm (fin série 1 60") à 149 bpm (fin série 180" ou 3')
Si l'observation des tendances globales de la cinétique de la réponse cardiaque est un indicateur important de la sollicitation globale de l'exercice, l'étude approfondie du tonus orthosympathique et parasympathique nous apporte de nombreuses autres informations sur l'activité, l'équilibre et l'état du système nerveux autonome (SNA)
Cette analyse approfondie se situe au niveau du Rise, du Contre-Rise, du Drift et contre Drift
L'interprétation de ces valeurs est intimement corrélée aux zones d'intensités afférentes à ces dernières.
De plus, elle doit etre individualisée et seule la longitudinalité de leur lecture ne fait sens.
Cette longitudinalité permet en outre de déterminer l'état adpatatif de l'athlète.
Le Rise correspond au pourcentage de variation de la fréquence cardiaque (Hr) entre la première seconde de la série la 60ème seconde.
Le Drift correspond au pourcentage de variation de la fréquence cardiaque (Hr) entre la 61ème secondes et la fin de la série.
Série de 1':
Rise de 22% à 17%, associé à des Contre-Rise sensiblement similaires et avec la même cinétique, on observe un bon tonus Orthosympathique quasiment symétrique au tonus Parasympathique signifiant un excellent équilibre du SNA
Série de 2'
Rise de 15% à 13% avec Contre Rise de 19% à 14%.
Tonus Orthosympathique toujours présent même s'il demeure moins élevé que dans les séries précédentes mais
ceci est logique car la dérive globale de la fréquence cardiaque (HR) limite le % de hausse en commencant chaque répétition avec une fréquence (Hr) légèrement supérieure.
Le tonus Parasympathique est supérieur à son antagoniste ce qui dénote 2 éléments :
Excellente tonicité et fraicheur de ce dernier
Equilibre conservé, la valeur du Contre-rise supérieure aux Rise s'explique en partie par le fait que Hr continue de s'élever sur la 2ème minute (versus équilibre quasi parfait Rise /Contre-Rise sur les séries de 1'), et donc commencera sa décroissance d'une valeur plus élevées.
Série de 3':
Rise de 12,5% égal au Contre-Rise signalisant un bon tonus Orthosympathique et Parasympathique signifiant un excellent équilibre du SNA encore à ce stade de l'exercice.
Le Drift est totalement adapté à la sollicitation
Série de 4':
Rise de 17% bénéficiant des 90" de récupération du contre exercice de la série de 3' et Contre Rise à 24% car la récupération fut faite légèrement moins élevée 238w Vs 261 (série 3') et 260w, 255w, 254w (série 2')
Le maintient du bon tonus Orthosympathique et Parasympathique en cette fin de séance intense nous conforte dans les analyses des valeurs des séries précédentes quand à l'assimilation des intensités et de la charge d'entraînement constamment compensée par la réponse adaptative du SNA.
Le drift est lui aussi totalement en phase avec la dérive qu'on est en mesure d'attendre de cette série avec 6,7%.
Un Drift supérieur serait synonyme d'une faiblesse ce la cinétique de Vo2, cinétique qui, pour cet athlète, est relativement "bonne".
Idem pour le Contre-Drift avec -3,5% qui tranche avec la forte baisse du Contre-Rise mais qui confirme la tendance de la baisse de Hr
Série de 5':
Le Rise de 13% (inférieur aux valeurs précédentes) est totalement justifié car la sollicitation est inférieure 97% Crit P vs 113%
Le drift de 6,55% est dans la norme de ce type d'effort à ce niveau de pourcentage de la puissance critique (Crit P)
CONCLUSION
La sollicitation de cette séance peut donc etre améliorée par une meilleure utilisation de la fonction ventilatoire notamment à travers une meilleure stratégie et un travail de coordination du système ventilatoire
Avec 17 minutes passée dans la zone de puissance cible, nous n'avons que 10 minutes correspondant à son équivalence en terme de consommation d'oxygène.
Le temps passé dans les zones de puissance représentant la charge externe (si travail en Z5 et volonté de sollicitations proche de Vo2) ne peut pas être seul indicateur de la précise implication physiologique (charge interne)
On peut parler de glissement entre la charge externe et sa correspondance en terme de charge interne
La série de 5' sous Sv2 entre 95 et 96% de la puissance critique nous permet d'observer un bon ratio du fonctionnement de l'équilibre des systèmes et un bon rendement énergétique 312w, 159bpm, 3,38 L Tv et 31 Rf.
Il sera d'ailleurs intéressant de proposer des séries plus longues à cette puissance afin d'observer les tendances d'évolutions des ces paramètres.
Amélioration fonction ventilatoire
Un travail de coordination ventilatoire sur des fréquences comprises entre 35 et 45 ppm avec un maintien du volume courant (Tv) aux alentours des 4L - 4,5L (en exercice ventilatoire) devrait permettre une amélioration substantielle du volume courant (Tv) durant l'effort, donc améliorer le Volume Total (Ve), et la Vo2 par extension (avec maintien de la fréquence ventilatoire proche des 41-45 ppm).
Il faut ajouter à cela, le "focus" attentionnel sur la ventilation durant l'effort.
On peut mesurer l'impact de la qualité de ce focus en comprant les données de 2 séances identiques, l'une faite sans feedback ventilatoire visuel et l'autre avec.
Action sur la distribution de la séance programmée
L'analyse nous indique que si nous voulons travailler profondément la Vo2 pour cet athlète, c'est à dire passer le plus de temps possible à Vo2 et flirter avec Vo2 max, il serait opportun de faire des séries de 4' plutôt que de 3' par exemple.
L'idéal des series de 5' avec une puissance moyenne légèrement inférieure à celle réalisée dans cet exercice (112 à 115% Crit P), pour situer entre 343 et 350w soit 107 à 109% de la Puissance critique Crit P)
Pour un travail portant sur l'amélioration de la cinétique de Vo2, des intervalles de :
3' (112-115% Crit P) avec de 6 à 10 répétitions
2' (115-120% Crit P) avec de 10 à 15 répétitions
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