Nous allons étudier les réactions physiologiques d'un athlète lors d'une séance proche de son seuil ventilatoire 2 sur la moyennisation de la sollicitation globalisée de l'exercice (moyenne de l'intervalle de travail avant la récupération)
A travers les différentes données de charges internes, nous pourrons interpréter les réponses métaboliques et optimiser l'impérieux enjeu de performance.
Force est de constater que dans le sport de haut niveau, le fil conducteur se résume, en définitive, à la performance finale...
Ou, comment produire le plus d'énergie mécanique possible (on ne parlera pas de rendement mécanique dans cet article, qui plus est, l'exercice est réalisé à vélo sur home trainer).
Dans notre cas, pour ce type d'effort, quelle est la meilleure stratégie ventilatoire et de cadence, pour maintenir la puissance cible sur la durée donnée.
Monitoring de la séance Home trainer
La séance en question
L'athlète:
Un cycliste professionnel de 23 ans, 173cm 62 kg
Puissance critique (Crit P) de 369w 5,95 w/Kg
Vo2 MAX mesurée (profilage fait précédemment) 80,2 ml/min/kg
Vo2 de 60,8 ml/min/kg à 95% de puissance critique (Crit P)
Testing devices utilisés:
Vo2 Master
Core sensor
Moxy monitoring
HRM Pro Plus
Powerbreathe K5
Powerbreathe smart sensor
Shimano Powermeter
Wahoo Kikr
Spirométrie Pré-séance:
Expiratoire
FeV1: 4,30 L FeV6: 5,55 L
FeV1 / FeV6: 0,77
S-Index: 184 CmH2O
Inspiratoire
S-Index: 165 CmH2O
PIF: 8,8 L / S
Volume: 5,1 L
Volumes courants idéaux:
i Tv: 3,61 L
i Tv R: 3,5 L
La séance réalisée
Nous pouvons observer ci contre une sélections de variables physiologiques nous permettant de nous aider à déterminer la meilleure stratégie ventilatoire pour cet athlète dans l'état de forme avec lequel il a réalisé la séance.
Cet exercice avait pour vocation le maintien d'une puissance moyenne sur la série d'environ 95-97% de puissance critique (modélisation d'un effort de 40' "presque continu" avec cependant des variations similaires aux ruptures de pentes lors d'ascensions
L'objectif initial était donc proche des 355-360W (5,7-5,8 W/Kg)
Les critères utilisés pour interprétés chacune des séries et déterminer le meilleur pattern ventilatoire
Afin de faire apparaitre de façons simplifiées UNE VALEUR nous aidant à identifiez le meilleur pattern ventilatoire permettant le meilleur rendement énergétique
Pour cela, nous prenons la puissance / VE
Pourquoi avoir choisi ces valeurs?
Ce sont les 2 valeurs les plus éloignées si nous modélisions une "chaine cinématique de la performance globale)
Nous aurions à l'entrée, l'air inspiré et la puissance mesurée à la sortie
Le résultat laisse apparaitre le nombre de Watts mesurés par litre d'air inpiré.
A travers ce ratio aussi que parlant que ce qu'il est pertinent dans son choix pour nous guider à identifier la série la plus "rentable" d'un point de vue métabolique, intéressons nous plus spécifiquement aux autres variables physiologiques.
Maintenant que nous connaissons la série la plus "efficiente", observons en quoi elle se distingue dans quelles proportions des autres séries (Série 6, 4, 5, 3, 1 et 2)
Prenons les paramètres dans l'ordre dans lequel ils sont énumérés
Consommation d'oxygène (Vo2)
Ce n'est pas la série avec la Vo2 la plus importante, elle n'est que la 2ème ex aequo avec le série 1
La Serie 2 (59,32), plus haute Vo2 se révèle etre meme la moins rentable de toutes
La Vo2 n'est donc pas le seul déterminant majeur de la performance
Volume total (Ve)
La série 6 (plus rentable) est celle qui a le plus petit Ve,
Et le classement fait par code couleur est meme précisément dans l'ordre de grandeur décroissant des valeurs indiquées
Donc le volume d'air n'est pas forcement le plus discriminant et un variable seule à interpreter pour estimer une performance globale de le sport cible
Volume courant Tv
La série 6 (plus rentable) n'a pas le plus grand volume courant mais s'en rapproche globalement
Le classement couleur est proportionnel aux valeurs de volume sauf la série 2 avec le plus haut volume sui se révèle etre la moins rentable
Le Volume courant influence donc fortement la performance (cas de cinq des 6 séries) mais avec des réserves (1/6
85% des cas de notre exemple sont des bons repondeurs à cette relation (Tv et performance)
Ce parametre sera donc à rapporcher d'autres variables.
Fréquence ventilatoire (Rf) et Fraction d'oxygène dans l'air expiré (FeO2)
Il y a une relation linéaire de forme décroissante entre la série la plus "rentable" (série 6) et le plus bas FeO2 et la plus basse Rf
Ceci se vérifie sur toutes les séries
Plus basse est la Rf et plus bas est donc le FeO2
La consommation moyenne d'oxygène n'est pas un prédicateur d'économie, ni de coût énergétique, pas plus que le volume total (Ve).
Cependant il est néanmoins, dans une moindre mesure, une forme de pré-requis...
Mais pas à n'importe quel prix...
Ve = Rf x Tv telle est la formule mathématique
Avec :
Ve, le volume total d'air en litres/minute
Rf, la fréquence ventilatoire en cycles (inspiration-expiration) /minute
Tv, le volume courant en litre/cycle
Pour un volume total donné, ce qui sera le plus essentiel pour nous, avoir un Tv le plus haut possible et une Rf plus basse (résultat de Ve/Tv)
Cet enjeu de Rf suffisamment basse à un double objectif:
Optimiser l'extraction de l'oxygène musculaire (FeO2) en potentialisant l'effet Bohr `
Baisser le cout énergétique du réflexe métabolique ventilatoire
Les facteurs influents lors de ce monitoring:
Etant en état de pré-fatigue musculaire, l'athlète à vu sa capacité musculaire devenir discriminantes quant à sa propension à extraire l'oxygène
.
Le FeO2 est quasiment à + 0,5% supérieurs aux valeurs normatives pour ces zones de puissances habituelles observées chez cet athlète
Aussi, l'enjeu d'extraction de l'oxygène par les muscles impliqués fut plus que central.
Il a donc fallu, maximiser l'effet Bohr, avec une fréquence ventilatoire (Rf) plus basse qu'a l'accoutumée et un volume courant (Tv) plus élevé.
En couplant cela à une baisse du Cout énergétique de la ventilation (réflexe métabolique ventilatoire), il a pu, malgré cette pré-fatigue, demeurer relativement proche des zones demandées sur la séance
Sa seule petite erreur serait peut etre, d'avoir réalisé la série 1 à un trop haut niveau de puissance, en présumant ainsi de sa capacité à la maintenir, sur la séance totale.
Distortion entre sa "baseline capacity" et son "actual capacity" expliqué par la difficulté à prédire le % de pré-fatigue a déduire dans son objectif de puissance.
Un peu de Science de l'effort à l'aune de la perception de l'effort
A RPE égal, en pré fatigue, la puissance atteinte sera inférieure à celle de l'état Base line.....
Dans le contexte d'un effort long et continu, la capacité à prédire ce pourcentage est prépondérant sur la performance finale.
2 problématiques donc s'offrent aux athlètes d'endurance, ou aux athlètes devant réalisés, sur un intervalle temps, un effort continu en conditions de pré-fatigue
Problématique 1
Estimer le % de dégradation qu'induit la pré-fatigue dans l'effort cible et adapter le pacing optimal (base line pace - % pré- fatigue)
Réponse: lire l'article ici
Problématique 2
Cette approche peut-elle etre encore manipulée pour réduire ce pourcentage d'amputation de la performance
Réponse : oui, en manipulant la stratégie ventilatoire spécifiquement
Aurait-il pu directement utiliser la bonne stratégie ventilatoire?
D'ordinaire nous répondrions par la négative à cette question, cependant, le concernant, il possédait son profil de performance complet (réalisé lors du profilage physiologique complet) avec, par tranche, ses valeurs normatives de ventilation.
Aussi, en se calant plutôt sur la fourchette basse, il aurait directement pu faire des séries comme la 4 et la 6 par exemple
Conclusion :
Comme nous l'avons déjà documenté dans de précédentes publications (ici) et de façon consensuelle avec la littérature scientifique sur le sujet, la pré-fatigue périphérique a un effet sur la capacité d'extraction de l'oxygène au niveau musculaire.
Dans ce cas, il apparaît donc encore plus important, et de fait opportun, de maximiser l'effet Bohr et d'optimiser son coût énergétique global (réflexe métabolique ventilatoire).
Pour cela, il est préférable d'utiliser plutôt les valeurs basses de fréquences ventilatoires (pour une zone de puissance donnée) établies dans le profil de performance global, augmentant ainsi son volume courant.
Pour aller plus loin
Les autres leviers de performance à disposition de cet athlète (non développés dans cet article) montrent une bonne fraction de l'utilisation de son volume courant idéal (iTv).
Cet athlète avait débuté un entraînement ventilatoire en isocapnie depuis 2 mois, ce qui explique déjà une bonne amélioration de sa conscientisation, mobilisation et coordination des muscles ventilatoires.
Nous constatons un gain des volumes courants (Tv) d'environ 30 % par rapport à ''il y a 2 mois''.
Nous avions, pour des valeurs de puissance similaires, des Tv proches de 2,6 L, alors qu'aujourd'hui ils sont de l'ordre de 3,5 L.
Mais, nous observons également chez ce dernier une limitation de la puissance expiratoire, avec un ratio FeV1/FeV6 à 0,77.
Le travail en isocapnie n'a pas d'effet direct sur la puissance des muscles ventilatoires, et chez des populations d'athlètes d'endurance de niveau international, nous devrions trouver plutôt des valeurs de ratio entre 0,84 et 0,90.
Avec un ratio supérieur pour cet athlète, nous aurions effectivement eu un FeV1 supérieur, ce qui entraînera un Tv à l'effort supérieur également.
Par ricochet, un volume total plus haut avec une même Rf... soit une plus grande capacité à diffuser de l'oxygène.
Une indication (déjà présentée lors du compte rendu effectué sur le profilage physiologique complet réalisé 2 mois avant ce monitoring) d'entraînement inspiratoire à résistance variable et expiratoire des muscles ventilatoires sera à débuter dans les semaines à venir, en suivant l'évolution du protocole de mobilisation et de coordination déjà commencé en isocapnie, dont les améliorations enregistrées lors de ce monitoring apparaissent comme très intéressantes.
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